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Congo-Brazzaville : «Il faut veiller à ce que l’utilisation des ressources génétiques soit bénéfique aux communautés» – 27 août 2020
By: Observatoire congolais des droits de l'homme
Published: August 27, 2020
Countries: Republic of Congo
Document type: News and articles
Document ID: 8723
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Congo-Brazzaville : «Il faut veiller à ce que l’utilisation des ressources génétiques soit bénéfique aux communautés» – 27 août 2020

Au Congo Brazzaville, la législation forestière et environnementale met des garde-fous pour une gestion rationnelle des ressources issues de l’exploitation forestière dans sa diversité. Mais dans sa mise en œuvre cette législation rencontre quelques difficultés tendant à pénaliser les communautés locales et populations autochtones. ’

Era Environnement au Congo-Brazzaville a rencontré Cynthia Nina Kiyindou Yombo, chargée de programme ressources naturelles et droits des communautés forestières à l’Observatoire Congolais des Droits de l’Homme (OCDH). Elle fait le point sur les mécanismes de partage de bénéfices liés à l’utilisation des ressources génétiques et l’exploitation des savoirs faire des communautés locales et populations autochtones.

ERA ENVIRONNEMENT: Que représentent les ressources génétiques pour les communautés locales et les populations autochtones ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: Aujourd’hui, beaucoup des gens ignorent l’existence de ces ressources génétiques, qui sont des ressources autres que le bois qu’on peut trouver dans la forêt. Dans les ressources génétiques nous avons des racines des plantes, des sèves, les écorces, les feuilles, etc. à côté de ces espèces floristiques nous avons des ressources génétiques qui sont issues des produits de la faune tels que les peaux d’animaux, les ossements…Pour les communautés, les ressources génétiques, c’est quelques choses de fondamentale parce que leur vie est basée sur cela, ce sont ces ressources qu’elles utilisent pour leur pharmacopées, faire des rituelles dans les forêts ou dans les sites sacrés. C’est vraiment fondamental pour les communautés.

ERA ENVIRONNEMENT: Pensez-vous qu’au niveau du Congo ces ressources sont gérées rationnellement ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: Si ces ressources étaient gérées convenablement aujourd’hui on ne s’interrogerait pas sur leur utilisation. Le problème se pose avec acuité. Avant cela n’était pas vraiment perceptible. Maintenant avec la pandémie de Covid 19, de plus en plus les gens font recours à ces ressources. Il est donc souhaitable que cette question soit bien encadrée juridiquement pour que les communautés locales et les populations autochtones arrivent à se situer par rapport aux autres communautés.

ERA ENVIRONNEMENT: A ce propos que dit le code forestier congolais ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: J’ai participé à quelques travaux relatifs à sa révision. Dans la dernière version qui avait été adoptée en conseil des ministres, il y avait quelques dispositions qui avaient été insérées concernant la gestion de ces ressources. Mais étant donné qu’il y a eu des modifications, il est difficile pour nous de dire actuellement si ces dispositions ont été maintenues surtout que le nouveau code forestier traine à être promulguer.

ERA ENVIRONNEMENT: On peut dire qu’il y a un mécanisme de partage des bénéfices à l’endroit des communautés locales et des populations autochtones ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: A la lumière de la version qui a été adoptée au conseil des ministres, il y a certaines dispositions qui ont été prises pour l’accès aux ressources génétiques.

ERA ENVIRONNEMENT: Des communautés qui sont dans les Unités Forestières, accèdent-elles facilement à ces ressources ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: L’accession à ces ressources n’est pas interdite pour les communautés locales et populations autochtones parce qu’elles exercent les droits d’usage. Dans les zones d’exploitation forestière et dans les aires protégées, ces mêmes populations gardent ces droits d’usage, elles ont le droit de prélever les ressources génétiques pour leur sécurité alimentaire, pour la santé et pour les besoins culturels.

ERA ENVIRONNEMENT: Au niveau de vos structures, comment faites-vous le suivi pour que ces populations aient accès à ces ressources ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: C’est le message que nous voulons faire passer à travers cet entretien, nous voulons que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que ses ressources qui sont méconnues fassent l’objet d’une attention particulière parce qu’elles sont fondamentales pour les communautés. Il y a un texte qui protège la pharmacopée autochtone, c‘est déjà à encourager. Nous voulons à ce que le gouvernement puisse s’atteler pour que cette question liée à l’utilisation des ressources génétiques trouve une solution qui va satisfaire les communautés locales et les populations autochtones. De telle sorte que leur utilisation soit profitable à ses communautés qui sont des gardiennes traditionnelles de ces ressources depuis des années et des générations.

ERA ENVIRONNEMENT: Lorsqu’on regarde le traité de Nagoya et le code forestier congolais peut-on dire que les communautés ont une garantie pour la gestion rationnelle de ces ressources ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo : La garantie, elle est juridique. Ce sont les textes qui accordent une garantie. Voilà pourquoi notre message se situe à ce niveau, celui de la sécurisation des ressources génétiques. Nous demandons plus de garantie juridique parce que le protocole de Nagoya dont notre Etat est signataire, dit que tous les Etats signataires doivent prendre au niveau national des mesures législatives et réglementaires pour faciliter l’accès des communautés locales et populations autochtones aux bénéfices liés à leur utilisation. Il y a aussi un aspect lié à l’utilisation des savoir-faire des communautés locales et des populations autochtones.

ERA ENVIRONNEMENT: Y a-t-il un appel de votre part à l’endroit des pouvoirs publics ?

Cynthia Nina Kiyindou Yombo: Nous lançons un appel à toutes les autorités et auprès des partenaires financiers et techniques qui peuvent nous appuyer dans ce sens pour que le message que nous avions relayé à travers cette interview puisse être repris par ces partenaires lors des rencontres stratégiques pour faire avancer les choses, que les communautés rentrent effectivement dans leurs droits. Le protocole de Nagoya sur l’utilisation des ressources génétiques stipule que « les dividendes liées à l’utilisation de ces ressources doivent être partagées équitablement avec les communautés locales et les populations autochtones qui doivent donner leur consentement en ce qui concerne le prélèvement. Donc c’est fondamental pour nous parce que ce sont des ressources des communautés et nous défendons les droits de ces communautés voilà pourquoi nous pensons que c’est fondamental que ces ressources soient protégées pour l’intérêt des communautés locales et les populations autochtones.

Propos recueillis par Marien Nzikou-Massala