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Côte d’Ivoire

La Côté d’Ivoire a commencé les négociations d’un APV en 2013. La plateforme de la société civile avait mis du temps à s’établir dans un premier temps, mais aujourd’hui, elle s’emploie à exercer une véritable influence sur les réformes forestières liées au processus.

Les forêts couvrent 22% du territoire de la Côté d’Ivoire. Néanmoins, les forêts primaires représentent à peine 2% de celui-ci. Il fut un temps où la Côte d’Ivoire était considérée comme l’un des pays les plus densément couvert de forêts en Afrique occidentale. Cependant, elles ont lourdement été exploitées, ce qui a eu pour conséquence une réduction importante de leur superficie: si en 1960, celles-ci représentaient une superficie de 12 millions d’hectares, aujourd’hui le chiffre est passé à 2,5 millions d’hectares. Les forêts contribuent en effet à l’économie nationale et l’exportation de bois est estimée à 150.000 mètres cubes par an.

Dernière mise à jour de l'APV :

Il y a eu du mouvement sur diverses questions relatives au processus d’APV FLEGT, depuis que ce dernier a été relancé début 2019.

Une feuille de route a été élaborée entre le gouvernement de la Côte d’Ivoire et l’UE, fixant une échéance pour la signature d’un APV FLEGT en 2022. Plusieurs acteurs membres du Comité technique de négociation (CTN) ont participé à sa conception (société civile, chefferie traditionnelle, secteur privé) ; une version finale devrait être officiellement adoptée en décembre 2019.

Lors d’un exposé donné le 10 décembre 2019, le ministère des Eaux et Forêts (MINEF) a qualifié d’« acquis » des aspects importants de l’APV, tels que l’amélioration de l’implication des parties

prenantes et de la clarté de la législation à travers des réformes réglementaires participatives ; une transparence améliorée par la mise en ligne des procédures et informations générées dans le secteur, et par la mise en œuvre de l’Observation indépendante ; la proposition de réforme des marchés publics de bois légal ; et la proposition d’un système national de traçabilité. La définition de la légalité est en cours, tout comme la mise en place du Système de vérification de la légalité (SVL).

Ces avancées et la finalisation du Programme national d’amélioration de la gouvernance forestière (PNAGF) sont très importantes, mais le cadre dans lequel FLEGT se construit demeure source de préoccupation. Suite à l’adoption du nouveau Code forestier en juin 2019, les efforts déployés actuellement se concentrent sur l’élaboration des quelque 30 décrets et arrêtés d’application nécessaires pour préciser les dispositions du Code.

L’un de ces décrets a été rapidement élaboré et signé. Il s’agit du décret prévoyant la possibilité de créer des agro-forêts en vue de leur réhabilitation : le MINEF envisage de classer ces forêts dégradées dans la catégorie agroalimentaire, ce qui aurait pour conséquence que seuls 20 % de la surface serait cultivable et donc que les 80 % restants seraient réservés à la réhabilitation. Pour le moment, il ne s’agit là que d’une possibilité : aucune agro-forêt n’a été créée jusqu’à présent. Quatre autres décrets concernant les agro-forêts sont en cours d’élaboration.

La mise en pratique des règles relatives à l’agro-foresterie pourrait bien générer des tensions : il ne s’agit évidemment pas de forêts vides, mais bien de forêts peuplées de petits producteurs. Les règles prévoient l’octroi de concessions à de grandes entreprises, mais aucune protection pour les communautés qui y résident n’a été inscrite dans le cadre juridique jusqu’à présent.

Les parties prenantes ont été invitées à formuler des observations sur l’ensemble des textes d’application, notamment lors d’un atelier organisé avec PTF Forêt-Environnement de Côte d’Ivoire, une plateforme environnementale de la société civile. Deux réunions ont eu lieu, présidées par le ministre des Forêts. Techniquement, les parties prenantes participent à l’élaboration de ces textes, mais leurs commentaires ne sont pas toujours pris en compte.

Même ici, des problèmes considérables subsistent. Le calendrier est si serré qu’il ne permet pas de mener des recherches et de recueillir les différents points de vue sur le terrain de manière adéquate. De plus, les réunions se tiennent à Abidjan et, même si la société civile fait de son mieux pour faire valoir les préoccupations des communautés éloignées, il n’en reste pas moins que ces communautés ne sont pas directement consultées. Les ONG ne peuvent pas, à distance, entendre et relayer leurs craintes comme il se doit. Aucune mission n’a été envoyée auprès des communautés pour recueillir leurs points de vue, et rien n’interdit expressément de déposséder les populations résidant actuellement dans les forêts. La société civile s’inquiète que les populations se retrouvent lésées face aux grands groupes industriels. L’issue dépendra en grande partie du Plan d’aménagement du territoire, qui fait l’objet d’un arrêté d’application.

La situation n’est pas plus sûre en ce qui concerne la réforme du régime foncier. Une loi adoptée en 1998 prévoyait la possibilité d’enregistrer les terres traditionnelles dans un délai de 10 ans. Après son expiration, cette période a été prolongée jusqu’en 2023. Bien que les dispositions visant à prolonger à nouveau ce délai aient été récemment assouplies, il est peu probable que les communautés pourront saisir cette occasion pour enregistrer des titres fonciers.

Ici, ce n’est pas le calendrier qui pose problème, mais le coût. Au cours des deux dernières décennies, seuls 2 % des titres traditionnels ont été enregistrés ; le coût exorbitant de l’enregistrement officiel des terres exclut de fait les communautés du processus. Sans une aide du gouvernement (qui n’est pas prévue) ou une aide financière et juridique des instances internationales, la reconnaissance du régime foncier traditionnel a toutes les chances de rester lettre morte, et la possibilité d’une éventuelle dépossession reste une menace réelle.

En ce qui concerne la redevabilité, le nouveau Code forestier prévoit des sanctions plus sévères, allant de l’amende à l’emprisonnement. En cas de peine de prison, il est toutefois généralement possible de trouver une solution à l’amiable avec le gouvernement au travers d’une « transaction » : une somme d’un montant supérieur à l’amende peut être versée en supplément pour éviter une peine d’emprisonnement. Il convient de noter qu’il ne s’agit pas ici de corruption ; cette possibilité est prévue dans le Code et ne s’applique pas aux crimes les plus graves (art. 81). La société civile, en cas de transaction, n’est pas informée du montant versé et ne peut donc pas déterminer si celui-ci est véritablement dissuasif.

Il reste difficile de se prononcer sur l’application pratique des dispositions du Code sans données adéquates de terrain. L’ONG Wild Chimpanzee Foundation a été habilitée à agir en tant qu’observateur indépendant des forêts dans le processus FLEGT, en particulier dans certaines forêts classées du parc national de Taï. Dans ses rapports d’observation indépendante, elle relève divers problèmes, mais note également la volonté du gouvernement de les résoudre. En dehors de cela, on sait peu de choses sur la mise en œuvre de la réglementation forestière.

Au vu de l’incertitude qui plane sur le cadre général, la société civile se garde d’exprimer crainte ou optimisme en ce qui concerne le processus FLEGT, mais elle attend l’élaboration des premières annexes relatives au Système de vérification de la légalité.

Dernière mise à jour réalisée en janvier 2020.

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